dimanche, octobre 6

Fermeture de l’usine Steris Le Haillan : les raisons d’un fiasco

Fin mars 2025, le site du Haillan, près de Bordeaux, mettra la clé sous la porte. Exit les tables d’opération qui ont fait la réputation de Steris, avec ses bras articulés et ses solutions d’éclairage. « Quand l’information est tombée, début mai, ça été un effarement pour tous les salariés, se souvient David Garnier, ingénieur au département recherche & développement et élu du CSE (comité social et économique) de l’entreprise girondine. Cela faisait des mois, voire des années, que le message de la direction était dithyrambique à propos d’objectifs battus ». À croire pourtant que les résultats étaient encore insuffisants aux yeux de la maison mère américaine et de ses actionnaires. Le groupe Steris (4,6 milliards de dollars de chiffre d’affaires, 16.000 collaborateurs et 200 sites dans le monde) a encore vu son bénéfice net augmenter de plus de 7 % à près de 140 millions de dollars au premier trimestre de cette année.

Lire aussiPlombées par le bâtiment, les TPE-PME restent dans le rouge en Nouvelle-Aquitaine

Le CSE et le seul syndicat maison, l’Unsa, dénoncent une décision strictement financière alors que la direction évoque elle, au contraire, « une dégradation significative des performances économiques liée au positionnement difficile sur le marché européen et à l’augmentation des coûts de production. » « Malgré l’implication et la qualité du travail des collaborateurs et de nombreux investissements, poursuit Arnaud Corsat, directeur général de Steris SAS, notre part en Europe, Moyen-Orient, Afrique et France demeure inférieure à 5 % depuis 10 ans. La France était sous perfusion depuis plusieurs mois à hauteur de plusieurs millions par an pour conserver sa marge. Cette situation n’était plus viable. »

Des investissements insuffisants

C’est en 2011 que le groupe américain décide de regrouper au Haillan plusieurs activités industrielles jusqu’alors dispersées entre la banlieue d’Orléans, le sud de l’Angleterre et la Suisse. Après un investissement initial de 11 millions d’euros (et une subvention de la Région Nouvelle-Aquitaine de 1,2 million), en 2022, Steris avait même injecté 8 millions d’euros en Gironde pour agrandir le site. « Nous avons mis en œuvre tous les moyens possibles pour permettre au site du Haillan de se développer sur le marché français et européen, affirme Arnaud Corsat. Néanmoins, ces investissements n’ont pas été suffisants ». Le plan social actuel prévoit donc la suppression de 96 postes au Haillan.

A l’issue, le groupe conservera environ 150 personnes dans toute la France. S’il reconnaît l’effort mené par la direction pour « recaser » à proximité de leur ancien lieu de travail les salariés non licenciés obligés de quitter leurs bureaux, David Garnier accuse Steris SAS de chercher à se séparer des produits à faible marge, comme les tables d’opération, pour se réorienter vers les articles de stérilisation et les consommables (gants, détergents…) bien plus rémunérateurs. La division en question, baptisée « Life Science » et installée à Lyon et près d’Orléans, n’est d’ailleurs, selon lui, absolument pas impactée par les réductions d’effectifs.

A la recherche d’un repreneur

Dans son rôle, le CSE va maintenant batailler pour tenter d’améliorer encore les conditions de départ et les mesures d’accompagnement proposées aux salariés licenciés. Dans ce bras de fer, la direction de Steris met en avant son ouverture à la discussion : « Le processus d’information consultation dure normalement deux mois, précise Arnaud Corsat. Mais nous avons décidé d’allonger la durée de la consultation de deux mois supplémentaires. Nous aurons organisé au total durant cette période neuf réunions avec le CSE. » Elle affirme notamment avoir revu à la hausse le budget de formation proposé aux salariés sur le départ. Il est passé de 5.000 euros par personne à un maximum de 15.000 euros par personne pour les formations dépassant 300 heures.

La dernière réunion de négociation est programmée le 24 septembre prochain. A l’issue, l’État, à savoir la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS), sera appelée à se prononcer sur la conformité du plan à la loi. La direction s’est elle mise à la recherche d’un repreneur potentiel et appelle toute entreprise intéressée par une reprise de tout ou partie des personnels et/ou actifs à se manifester. A ce jour, aucune offre concrète n’a été reçue mais les visites se poursuivent, assure-t-on chez Steris.

Lien source : Fermeture de l'usine Steris Le Haillan : les raisons d'un fiasco