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BeTomorrow : de stagiaire à actionnaire majoritaire, l’ascension d’Alexandre Ribeiro

« Repousser les limites des usages numériques de manière maîtrisée et solide. C’est ça notre positionnement chez BeTomorrow : combiner les qualités créatives et les solutions fiables ! », résume Alexandre Ribeiro. Celui qui est le directeur général de cette PME depuis 2018 en est désormais aussi l’actionnaire majoritaire après le rachat opéré fin 2022 auprès des deux cofondateurs de l’entreprise : Jean-Dominique Lawrens, un ancien de chez Kalisto, et Sylvie Clin. Une passation de témoin logique tant Alexandre Ribeiro connaît et incarne cette entreprise de 70 salariés et 7 millions d’euros de chiffre d’affaires qui développe des projets numériques haut-de-gamme pour des grands comptes (*). Et pour cause, c’est au sein de BeTomorrow qu’il a fait toute sa carrière professionnelle depuis 2003. L’histoire de deux destins intimement liés.

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Un nouveau stagiaire

Il y a toujours une part de hasard dans les trajectoires professionnelles, un facteur chance qu’il faut ensuite savoir faire fructifier. Pour Alexandre Ribeiro, c’est lorsqu’il tombe en 2003 sur une offre de stage chez BeTomorrow alors qu’à tout juste 22 ans, il termine ses études de développeur informatique à l’Enseirb-Matmeca de Bordeaux. Le contexte est morose dans la plupart des grandes entreprises de services numériques touchées par l’explosion de la bulle internet et le jeune étudiant fait le pari de la startup. Quelques semaines plus tard, il pousse donc la porte de cette entreprise créée un an plus tôt pour développer et optimiser des applications mobiles. Un vrai défi à une époque où ni l’iPhone ni l’App Store n’existent. « Le stage de six mois s’est bien passé et j’ai intégré l’entreprise en tant que 7e salarié ! À l’époque, j’étais à fond dans ma mission sans aucun plan de carrière », rigole aujourd’hui Alexandre Ribeiro, dans son large bureau de directeur général au cœur des Chartrons.

Alexandre Ribeiro

Alexandre Ribeiro, dans les locaux de BeTomorrow (crédits : Agence APPA).

Mais le jeune salarié fait ses preuves et, deux ans plus tard, en 2005, BeTomorrow décroche le prix mondial de la meilleure application mobile au Mobile world congress de Barcelone pour son suivi sur mobile de la Coupe de l’America. « C’est le premier projet collectif que j’ai piloté et ça a contribué à mettre BeTomorrow sur la scène européenne avec un gros bond de légitimité juste avant que l’iPhone ne démultiplie le marché des app mobiles », note le dirigeant.

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Le tournant de la méthode agile

Malgré, ou peut-être grâce, à ce succès, Alexandre Ribeiro ne reste pas longtemps développeur. Il se souvient du déclic lorsqu’il découvre les méthodes agiles de développement et de gestion de projet dans le cadre d’une collaboration avec Orange :

« J’ai compris toute la pertinence de ces méthodes pour développer des solutions et convaincre nos clients en arrivant à combiner deux injonctions contradictoires : ce qui est beau, innovant et sympa, d’un côté, et ce qui fonctionne, qui est sérieux et solide, de l’autre. À mon sens, c’est de là que date le fondement du positionnement de l’entreprise : réussir à mêler ces deux dimensions. »

Fondamentalement, Alexandre Ribeiro est de nature à donner son avis lorsqu’on lui demande… mais aussi lorsqu’on ne lui demande pas mais qu’il juge utile de s’exprimer. « J’ai poussé des évolutions et organisations nouvelles dans l’entreprise, notamment sur la qualité des projets. Je me suis progressivement installé dans une fonction de conseil stratégique de plus en plus claire et affirmée auprès de la direction. En 2013, ça s’est formalisé en devenant general manager », raconte-t-il. Un moteur qui nourrit donc sa trajectoire dans une forme de quitte ou double : « C’est certain que j’ai tendance à dépasser mes fonctions : plus pour défendre mes idées que pour suivre un plan de carrière. Il y a des entreprises où s’est bien perçu de déborder de son périmètre, comme chez BeTomorrow, mais d’autres où c’est beaucoup moins bien vu ! Il faut donc parfois rester prudent. »

L’envol de Dronisos ouvre des espaces

En 2018, la relation de confiance avec Jean-Dominique Lawrens et Sylvie Clin s’approfondit encore. Les deux dirigeants, qui ont progressivement délégué la gestion opérationnelle de BeTomorrow à Alexandre Ribeiro, le nomment officiellement directeur général. Cela leur permet de se concentrer sur leur nouvelle société Dronisos qui est, à l’origine, une spin-off de BeTomorrow et qui vient de lever des fonds pour se développer de manière autonome.

« C’est à nouveau la chance qui intervient à ce moment-là ! Même si le fait que l’entreprise tourne avec moi les a probablement aussi convaincus de prendre du recul », réfléchit Alexandre Ribeiro, qui obtient, à la même occasion, 5 % du capital de la PME. « Une manière de me fidéliser et de m’associer à la croissance de l’entreprise sur un marché très concurrentiel à l’époque, avec l’arrivée à Bordeaux de plusieurs entreprises du numérique. » Grâce cette décision, le nouveau directeur général assume un positionnent plus clair sur « les produits numériques haut-de-gamme et l’innovation sérieuse ». Cela se traduit par une croissance soutenue passant de moins de trois millions d’euros de chiffre d’affaires et 40 salariés en 2018 à près de sept millions d’euros et 70 salariés en 2022.

BeTomorrow

Les locaux de BeTomorrow, rue Barreyre, à Bordeaux Chartrons (crédits : Agence APPA).

Seul maître à bord

Et pour parachever son parcours, Alexandre Ribeiro découvre, en 2020, au détour d’une discussion l’existence de montages bancaires qui lui permettraient de racheter la majorité du capital par le biais d’un LMBO (leveraged management buy out / opération d’acquisition réalisée par les managers de l’entreprise en recourant à de l’endettement). Une révélation qui, petit à petit, prend corps dans la tête du dirigeant avant que la transaction « de plusieurs millions d’euros » n’aboutisse :

« C’est quelque chose que je n’avais jamais imaginé pensant que c’était complètement hors de portée. Mais l’idée a fait son chemin, je me suis renseigné pendant près de deux ans en me disant que l’avenir le plus épanouissant pour moi était d’être complètement à la tête de BeTomorrow pour pourvoir assumer et déployer totalement mes choix. C’était plus naturel que ça vienne de moi et j’ai donc finalement proposé l’idée à Jean-Dominique et Sylvie puis ça s’est fait à l’automne 2022 avec le concours de MBA Capital. »

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Avec son capitaine, désormais seul maître à bord, BeTomorrow n’entend pas pour autant céder aux sirènes d’une croissance effrénée et vise plutôt « une croissance maîtrisée de 20 % par an pour atteindre 14 millions d’euros en 2026 et plus d’une centaine de collaborateurs. On veut continuer à privilégier de petites équipes créatives et des projets de qualité ». L’entreprise va aussi déployer Skillagora, sa solution de gestion de formations collaboratives en interne. L’implantation d’une équipe à Paris sera au programme de 2024. Et du côté de l’équipe, les stagiaires restent le principal vivier de recrutement de BeTomorrow même s’ils n’ont, bien sûr, pas tous vocation à devenir PDG.

« Le choix de la continuité et de la confiance »

Pour Jean-Dominique Lawrens, le cofondateur de BeTomorrow avec son épouse Sylvie Clin, la vente à Alexandre Ribeiro s’est faite naturellement. « Après 20 ans, on était prêts à céder l’entreprise. Entre Alexandre et d’éventuels repreneurs parisiens, la question ne s’est pas vraiment posée tant le choix était évident. C’est le choix de la continuité et de la confiance », considère Jean-Dominique Lawrens. Celui qui est désormais aux commandes de Dronisos, une autre réussite entrepreneuriale, dépeint son ancien stagiaire comme « quelqu’un qui a de la suite dans les idées et une bonne vision du marché et de l’innovation » et se dit « impatient de voir les chemins qui seront explorés par BeTomorrow ».

(*) BeTomorrow développe ou a développé des projets numériques pour de nombreux grands comptes tels que Pôle emploi, Orange, l’Elysée, Biogen, Suez, Belin Education, Vinci, la Société européenne de satellites, la SNCF, Cultura, Atos, La Poste ou encore Thales.

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