samedi, juillet 27

Emploi des seniors : le gouvernement pressé de durcir les règles d’indemnisation

Patronat et syndicats viennent tout juste de terminer la négociation assurance-chômage qu’ils sont déjà invités par le gouvernement à ouvrir rapidement d’autres discussions, notamment sur l’emploi des seniors. Et pour cause, pour l’emploi des 60-64 ans, la France est à la traîne, avec 36 % d’actifs en emploi, soit 12 points de moins que la moyenne de la zone euros. L’objectif de l’exécutif est donc clair : doubler le taux d’emploi des salariés les plus âgés d’ici à 2030. Le gouvernement vise les 65% d’ici à 2030.

400 millions d’euros d’économie

Dans la dernière convention Unedic, les partenaires sociaux ont pourtant déjà acté de décaler les droits des demandeurs d’emploi les plus âgés. Avec l’effet de la dernière réforme des retraites, qui recule l’âge de départ de 62 à 64 ans, ils se sont mis d’accord pour que les règles d’indemnisation de l’Assurance chômage s’appliquant aujourd’hui aux plus de 55 ans soient décalées à 57 ans. Aujourd’hui un demandeur d’emploi de plus de 55 ans bénéficie d’une durée d’indemnisation pouvant aller jusqu’à 27 mois, contre 18 mois pour les autres inscrits à Pôle emploi. Au-delà de 62 ans, un chômeur peut aussi obtenir des dispenses de recherche d’emploi tout en continuant d’être indemnisé. Economies attendues pour le régime Unedic : 440 millions d’euros.

Réduire la durée d’indemnisation des seniors

Mais pour l’exécutif, c’est loin d’être suffisant. Dans son interview à la Tribune du Dimanche, ce 19 novembre, Bruno Le Maire se dit clairement partisan d’un tour de vis supplémentaire, en matière d’indemnisation. Le ministre de l’Économie ne rentre pas dans le détail, mais le sous-entendu est sans appel, la durée d’indemnisation des plus de 57 ans est trop longue et n’incite pas la reprise du travail. Aussi, l’une des pistes préconisées par Gilbert Cette, économiste, réputé proche d’Emmanuel Macron pourrait être d’aligner cette durée d’Indemnisation sur celle des actifs.

Les pré-retraites « Unedic » dans le viseur

Elisabeth Borne, la Première ministre a souvent taclé ces petits arrangements tacites entre employeurs, mais aussi salariés (et syndicats), qui consistent à encourager les départs anticipés à la retraite, en passant avant par la case chômage.  « Souvent dans un plan de restructuration, ce sont les plus âgés qui sont poussés vers la sortie, parce que ça arrange tout le monde, et que les travailleurs, parfois véritablement usés par leur métier se portent volontaires », dénonçait-elle, quand elle était ministre du Travail. A la sortie du Covid, alors que de nombreuses entreprises comme Orange, Sanofi et d’autres restructuraient, Elisabeth Borne pointait du doigt cette méthode. Ces préretraites « Unedic »qui ne disent pas leur nom permettent aux salariés concernés d’obtenir une couverture chômage jusqu’à l’âge de départ à la retraite. Le gouvernement tend à les supprimer.

Ruptures conventionnelles : des indemnités plus coûteuses ?

Aussi, pour ce faire, l’une des pistes serait de rendre plus coûteux les départs à la retraite des plus âgés. Le gouvernement a déjà pris une disposition en ce sens, entrée en application dès le 1er septembre dernier. Les indemnités de rupture conventionnelle individuelle et de mise à la retraite sont désormais soumises à un régime social unique. La contribution patronale passe à 30 % contre 20%.  L’objectif est d’éviter le recours massif à des ruptures conventionnelles dans les années précédant l’âge légal de départ. Et pour cause, si elles se sont largement substituées aux licenciements, elles sont nombreuses autour de 59 ou 60 ans. Reste à voir si le renchérissement de cette indemnité pour les employeurs s’avèrera suffisant pour inciter le maintien dans l’emploi des plus âgés. Nombre de DRH assurent, en effet, que la seule surtaxe financière ne réglera pas le problème.

Dans la même veine, lors des débats à l’occasion de la réforme des retraites, Olivier Dussopt s’était dit favorable à ce que le gouvernement revoit le régime fiscal et social des ruptures conventionnelles collectives. Cette idée pourrait être remise sur la table par l’exécutif.

Le retour de l’index senior ?

Autre solution, l’index senior. Sur le modèle de l’index égalité hommes-femmes, ce dispositif doit permettre d’établir un état des lieux dans chaque entreprise, de la manière dont les seniors sont traités – ont-ils accès à la formation ? à des progressions ? aux entretiens de fin de carrière ? etc-. Censuré par le conseil constitutionnel lors de la dernière réforme des retraites, cet outil présente l’avantage de proposer une cartographie de l’emploi des seniors. Reste que sa portée ne serait que limitée puisque les employeurs sont opposés à toute sanction qui en découlerait. Il n’empêche, comme l’association des DRH, l’ANDRH y est plutôt favorable, le gouvernement entend se pencher de nouveau dessus.

Mieux travailler les parcours, les fins de carrière

Syndicats et patronat sont, par principe, sur la même longueur d’onde pour voir les fins de carrière mieux préparées dans les entreprises, en favorisant par exemple les dispositifs qui consistent à sortir progressivement du marché de l’emploi. Cela fait longtemps que ces sujets sont abordés, reste à voir comment les mettre en pratique dans les entreprises.

Fanny Guinochet

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