jeudi, mai 2

Groupama paye le prix fort sur les sinistres climatiques

La diversification des risques n’est pas un vain mot dans l’assurance. Les assureurs qui diversifient leurs risques s’en sortent mieux que les autres. Le groupe mutualiste Covéa l’a démontré avec ses résultats canons portés par la réassurance. C’est au tour du groupe mutualiste Groupama de voir son résultat sauvé par la diversification de ses métiers, mais surtout par son développement à l’international, notamment en Roumanie où il est désormais le premier assureur du pays, et en Hongrie grâce à son partenariat avec la première banque hongroise OTP.

« Les résultats apparaissent comme très satisfaisants et tirent clairement profit de notre stratégie d’équilibre de nos risques menée depuis dix ans », résume Thierry Martel, directeur général du groupe, avec un résultat opérationnel de 627 millions d’euros – l’international qui contribue à 20 % environ du résultat opérationnel assurances – , un ratio combiné non-vie de 96,8% – « le métier est donc rentable », précise Cyril Roux, directeur général adjoint finances – et des fonds propres qui grimpe de plus d’un milliards d’euros à près de dix milliards, moitié en raison du résultat net (510 millions), moitié en raison du passage à la norme IFRS.

En première ligne sur les risques climatiques

Même si le marché de l’assurance récolte, dont Groupama est l’un des principaux acteurs, s’est bien comporté l’an dernier – et ce ne sera sans doute pas le cas cette année avec les fortes pluies – l’année 2023 n’a pas été de tout repos. Le premier semestre a été désastreux sur l’épargne et la retraite et le second semestre catastrophique pour l’assurance non-vie. Le groupe, très implanté notamment en Bretagne, a été frappé de plein fouet par les tempêtes hivernales et les inondations.

« Nous faisons plus que jouer le jeu sur le risque climatique en prenant 15% des sinistres alors que notre part de marché est de 10% », souligne Thierry Martel. Un coup de pique sans doute à certains assureurs qui seraient en train de mettre en place des politiques organisées tarifaires de désengagement des zones les plus à risque.

Ce que le récent rapport Langreney sur l’assurabilité des risques climatiques – et sur lequel la profession doit prochainement se prononcer – tente de limiter, sinon d’empêcher, par des propositions autour du fonds Barnier. « Le rapport ne va pas assez loin dans la modulation de la protection par la CCR (réassureur public, NDLR) pour les assureurs qui continuent d’opérer dans les zones à risque. C’est une question d’équité », estime le directeur général.

Une charge nette de réassurance plus élevée qu’en 2022

Sur les chiffres, l’addition pour Groupama est lourde : 1,3 milliard d’euros de charge brute de réassurance (sur un total du marché de 6,5 milliards) en 2023 contre 1,5 milliard d’euros en 2022 (pour un total de marché de 10 milliards). En net de réassurance, la facture est finalement plus lourde en 2023 qu’en 2022 : 968 millions d’euros contre 770 millions.

La raison ? Le retrait des réassureurs du marché des risques climatiques. Et encore, Groupama a réussi à amortir le choc en ayant une politique de souscription toujours étalée sur deux ans (50% de renouvellement chaque année). Et encore, ces chiffres renvoient au groupe. En France, la facture est encore plus lourde. « Environ 15 % des primes en assurance de biens et de responsabilité partent en France sur les sinistres climatiques. C’est considérable », avance Cyril Roux.

Le nouveau monde de la norme IFRS

Un nouveau monde. Difficile en effet, selon Cyril Roux, de comparer les résultats avec ou sans les nouvelles normes IFRS 9 et 17. « C’est même incomparable ! », avance le responsable des finances. En fait, tout change. Le chiffre d’affaires (montant des primes) n’est plus considéré comme une donnée comptable. Le ratio combiné (sinistres sur primes) de l’assurance-vie embarque désormais l’essentiel du résultat financier (dégagé sur les provisions mathématiques).

En définitive, un ratio supérieur à 100 % témoigne bien d’une activité déficitaire, sans rattrapage des produits financiers. Et la provision des rentes, notamment les bonus de taux, passe du compte de résultat directement en fonds propres.

Sans compter : la marge sur services contractuelle (3,6 milliards pour Groupama) qui valorise d’un coup les profits futurs des contrats d’épargne, qui seront ensuite lissés sur le résultat. Ce qui compte à la fin, c’est l’évolution des fonds propres, qui représente la valeur de l’entreprise à l’instant T. En revanche, la lecture des flux de résultats est plus compliquée à interpréter. « Nous sommes passés dans un système de reporting financier très orienté création de valeur », estime Thierry Martel… avec une pointe de regrets.

En revanche, le ratio combiné est désormais plus lisible et surtout il peut être désormais facilement comparé entre les branches d’assurance et entre les pays.

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