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Plein emploi en 2027 : François Villeroy de Galhau ne croit plus à la cible d’Emmanuel Macron

Les mauvaises nouvelles s’enchaînent pour le gouvernement. Après un dérapage du déficit public plus élevé que prévu, la promesse d’Emmanuel Macron de parvenir au plein-emploi d’ici à 2027 s’éloigne toujours plus. Dans sa lettre au Président de la République dévoilée ce lundi 22 avril consacrée à la France et l’Europe, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, s’est montré pessimiste sur l’objectif de faire baisser le chômage avant la fin du quinquennat. « Nous pensons que le plein-emploi est atteignable dans la décennie, sans doute après 2027 », a déclaré le banquier central, lors d’un point presse. « Le plein-emploi est en vue mais il y a cet aléa sur 2027 car il y a ce ralentissement économique », a-t-il poursuivi.

De nouvelles règles de l’assurance-chômage au premier juillet

Empêtré dans le marasme budgétaire, le gouvernement Attal est déterminé à poursuivre la réforme de l’assurance-chômage après l’échec des négociations entre les partenaires sociaux. L’exécutif veut fixer des nouvelles règles pour le premier juillet prochain. L’exécutif prendra « un décret de carence » qui « aura pour objectif de concourir à l’atteinte du plein emploi et de favoriser le retour rapide en emploi des chômeurs indemnisés », indique un communiqué de l’exécutif. Vendredi, le Premier ministre Gabriel Attal s’était d’ailleurs dit favorable à une modification des conditions d’affiliation à ce système assurantiel sur l’antenne de BFM-TV comme l’avait suggéré le député Renaissance et proche d’Emmanuel Macron, Marc Ferracci, dans les colonnes de La Tribune il y a quelques semaines. Au Royaume-Uni, le Premier ministre Rishi Sunak prévoit également de durcir les aides sociales pour pousser les chômeurs vers l’emploi. Les personnes jugées aptes à travailler se verront retirer leur assurance-chômage au bout de douze mois si elles n’acceptent pas les recommandations de leur conseiller pour l’emploi, comme une proposition de travail

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Un chômage à 7,7% en 2024 et 7,8% en 2025, prévoit la Banque de France

Sur le front des prévisions, la Banque de France table sur une hausse du chômage de 7,7% de la population active au sens du Bureau international du Travail (BIT) en 2024 après 7,3% en 2023. S’agissant de 2025, le chômage pourrait grimper à 7,8% avant de redescendre très légèrement à 7,7% en 2026. Le gouverneur explique que « la hausse temporaire du chômage [est] liée à la conjoncture ». Mais d’autres facteurs peuvent jouer. Après la pandémie, le rythme des créations d’emplois a accéléré plus vite que l’activité à la grande surprise des économistes. Autrement dit, l’économie tricolore a créé plus d’emplois que de richesse pendant les années post-pandémie. Ce qui a contribué d’ailleurs à faire ralentir la productivité du travail dans de nombreux secteurs.

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Les entreprises ont pu bénéficier des aides du Covid et des fortes subventions pour les embauches d’apprentis. Avec la fermeture du robinet des aides, les entreprises ont commencé à réduire la voilure sur les embauches. Résultat, les créations d’emplois ont nettement marqué le pas. Entre 2022 et 2023, les créations nettes ont été quasiment divisées par deux passant de 775.000 à 322.000 selon les calculs de la Banque de France. Pour 2024, l’économie française ne devrait créer que 10.000 emplois et pourrait même en détruire en 2025 (-41.000), avant de recréer des postes en 2026 (86.000).

Croissance : « rebond significatif » en 2025 et 2026

Sur le front de l’activité, la croissance du produit intérieur brut (PIB) devrait être de 0,8% en 2024, 1,5% en 2025 et 1,6% en 2026. « Sur la croissance nous voyons un ralentissement sans récession et une accélération significative en 2025 et 2026 », a expliqué François Villeroy de Galhau. Pendant sa présentation de la lettre, le gouverneur a pointé les prévisions optimistes du gouvernement sur la croissance. « Les prévisions – y compris de croissance – doivent être plus réalistes ».

Quant au programme de stabilité présenté la semaine dernière en conseil des ministres, « les prévisions de croissance ne paraissent pas intégrer suffisamment d’effet restrictif du redressement budgétaire », a-t-il ajouté.

Dans leur dernière note du mois d’avril, les économistes de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) ont calculé que « le durcissement attendu de la politique budgétaire, avec des économies structurelles prévues de 20 milliards d’euros supplémentaires, après les 10 milliards de 2024, amputerait la croissance de -0,6 point de PIB ».

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« Mal français »

En pleine tempête budgétaire, le gouverneur Villeroy de Galhau a estimé que « la cause profonde du « mal français », c’est la croissance continue des dépenses publiques ». Attaché aux principes de l’orthodoxie budgétaire, il a affirmé « qu’attendre seulement d’une future accélération de la croissance ou d’un retour au plein emploi la résolution de cette dérive est une illusion entretenue depuis trop longtemps ».

Il a plaidé pour « stabiliser » la dépense publique en volume. Concernant les baisses d’impôts, le responsable de la Banque de France a suggéré de faire une pause. En complément des économies de dépenses, « des mesures de recettes fiscales ciblées pourraient porter sur des élargissements d’assiette », a-t-il expliqué. Au gouvernement et dans la majorité, l’idée d’une hausse de la fiscalité fait son chemin. Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire est resté inflexible sur une hausse de la fiscalité sur les superprofits ces derniers mois. Mais à Matignon, le chef du gouvernement a ouvert la porte à une taxation des « rentes ». Et les débats sur une taxation des rachats d’action refont surface. Face au creusement des comptes publics, le gouvernement va peut-être devoir changer sa stratégie fiscale.

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Grégoire Normand

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