vendredi, mai 3

RER dans les métropoles françaises : l’Etat pose les règles du jeu

Lancée fin 2022 par Emmanuel Macron sous l’étiquette RER métropolitains, la démarche désormais connue comme celles des Services express régionaux métropolitains (SERM) entre dans sa phase opérationnelle. Après la pose du cadre législatif avec la loi du 27 novembre 2023, Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des Transports, a tenu une réunion de lancement avec des parlementaires, des représentants des régions, des associations d’élus ou encore la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut).

Il s’agit désormais pour l’Etat de « structurer la démarche » et « fixer le cadre national » pour attribuer le statut de SERM et les avantages – notamment financiers – qui vont avec. Patrice Vergriete a donc posé « règles du jeu, afin de voir comment nous voulons travailler avec les projets pour l’année en cours ».

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Deux phases pour être SERM

De fait, le processus se déroule en deux phases. La première sera consacrée à la labellisation des projets. Comme l’explique le ministre, il s’agira pour les candidats de définir le périmètre du projet, de ce qu’ils estiment être la région métropolitaine, de la gouvernance et des grandes lignes du projet.

La deuxième phase portera sur la définition du projet lui-même, jusqu’à sa validation par arrêté ministériel et donc l’obtention du statut de SERM. Cela portera, par exemple, sur le choix des modes de transport entre ferroviaire, cars express, service de covoiturage ou encore infrastructures pour les vélos.

« Le SERM, ce ne doit pas être seulement pas une offre de train supplémentaire, mais un projet global de mobilité qui vise à apporter aux habitants une offre supplémentaire de transports qui encourage le report modal. […] Le projet doit comprendre l’urbain, le péri-urbain, le rural et les pôles secondaires avec de la mobilité du quotidien. Cela demande la bonne échelle et la bonne articulation entre les différents modes de transport », détaille Patrice Vergriete.

Il prône ainsi une approche locale, projet par projet, afin de tenir des comptes des spécificités territoriales de chacune des régions métropolitaines, avec des temporalités et des maturités différentes.

Il y a aura tout de même des critères communs, indispensable pour accéder au statut de SERM. Selon le ministre, la définition du périmètre des SERM sera clef et il pourra y avoir « débat » – en se posant, par exemple, la question de savoir si Chambéry et Grenoble, toutes deux candidates, appartiennent à la même région métropolitaine et doivent donc déposer un dossier commun – la bonne adaptation des modes de transports choisis ou la prise en compte de la multimodalité.

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Premiers SERM d’ici la fin de 2024

A l’heure actuelle, les collectivités locales d’une trentaine de sites à travers la France métropolitaine ont manifesté leur intérêt. Une satisfaction pour Patrice Vergriete, qui estime que la démarche passe avant tout par la mobilisation de ces collectivités « en première ligne dans la mobilité du quotidien ». Sur ce total, une dizaine de projets sont plus avancés que les autres, tandis que certains ne sont encore qu’au stade de la déclaration d’intention.

Sur ces projets les plus avancés, de premières labellisations sont espérées d’ici deux mois avec des arrivées progressives par la suite. Les premiers arrêtés pourraient suivre d’ici la fin de l’année en cours. Cela pourrait concerner une demi-douzaine de projets, voire une petite dizaine. Patrice Vergriete prévient qu’il n’y aura pas pour autant de « grand soir » avec un premier lot de SERM validés, mais plutôt un étalement dans le temps au gré de l’avancement des projets. Et il prévient que le passage de la première phase ne garantit pas l’obtention de la seconde, ou que certains projets pourront prendre plusieurs années avant d’obtenir le statut de SERM.

Une conférence de financement sera organisée cet été, soit un peu plus tard que la date-butoir du 30 juin posée par la loi. Cela doit permettre aux services ministériels d’achever les études en cours sur la structuration financière et les dispositifs adéquats à la réalisation des projets. S’il a renvoyé la plupart des questions sur le sujet – admettant que c’était la partie la plus attendue par les porteurs de projet – à cette fameuse conférence, Patrice Vergriete a tout de même livré quelques éléments.

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Les règles financières arriveront cet été

S’il a rappelé que l’Etat avait déjà mis 800 millions sur la table à travers les Contrats de plan Etat-Régions (CPER) pour la période 2023-2027 – utilisable d’ores et déjà pour lancer les études et commencer à structurer les projets – le financement devrait s’accélérer par la suite. Ce sera notamment le cas avec les CPER 2028-2032, avec « beaucoup plus que 800 millions d’euros ». Le ministre ajoute qu’il y aura d’autres modes de financement que les CPER, qui seront présentés à l’occasion de la conférence de financement. Il admet aussi que le développement des SERM va reposer la question du financement des autorités organisatrices de mobilité (AOM), qui devront assumer de nouvelles charges d’exploitation avec le développement de ces nouveaux services.

Face à la conjoncture budgétaire actuelle, avec des demandes d’économies dans tous les ministères, Patrice Vergriete ne se montre pas inquiet quant à la pérennité du financement des SERM.

« C’est un engagement présidentiel, donc l’Etat prendra – et prend déjà – sa part dans le financement des SERM. La conjoncture budgétaire actuelle est donc en décalage avec ces projets qui seront étalés sur les 15 prochaines années. Il faut des mécanismes de financement qui ne fassent pas porter toute la charge sur 2024. Si cela avait été le cas, la conjecture budgétaire aurait pesé dessus. Mais sur 15 ou 20 ans, nous pouvons établir des plans de financement adaptés. Et il n’y a pas que l’Etat qui va participer : il y a les collectivités, il peut y avoir le contribuable local. Les modalités de financement peuvent être diverses et variées », déclare-t-il.

Il faudra bien ça pour financer cet ambitieux plan aux projets multiples, qui va nécessiter 20 à 30 milliards d’euros, voire 35 milliards tous contributeurs confondus selon certaines estimations, pour redessiner la carte de la mobilité du quotidien en France.

Léo Barnier

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