mardi, mai 7

Etats-Unis : alors que l’inflation augmente, les marchés restent satisfaits

C’est une donnée qui était attendue impatiemment par les marchés. L’inflation était à la hausse en mars aux Etats-Unis, à 2,7% sur un an contre 2,5% en février, mais est restée stable sur un mois à 0,3%, selon l’indice PCE publié ce vendredi par le département du Commerce, l’indice privilégié par la Fed. Les analystes tablaient cependant sur une accélération à 2,6% seulement, selon le consensus de Market Watch.

Dans le détail, l’inflation dite sous-jacente, qui exclut les prix volatils de l’alimentation et de l’énergie, reste aussi, stable, à 0,3% également sur un mois, et 2,8% sur un an. Les revenus des ménages ont, eux, enregistré une plus forte croissance en mars qu’en février, +0,5% contre +0,3%. Mais la hausse des dépenses est restée identique, à +0,8% sur un mois.

Lire aussiQuelles conséquences pour l’Europe si la Fed baisse ses taux après la BCE ?

Pour rappel, l’inflation avait grimpé de 2,4 en janvier à 2,5% sur un an en février, selon les données du département du Commerce. Elle avait cependant ralenti à 0,3% sur un mois, contre 0,4% le mois précédent.

Les marchés satisfaits

Malgré ces résultats, la Bourse de New York a ouvert en hausse, ce vendredi, rassurée par l’indicateur PCE et dopée par les bons résultats d’Alphabet (Google) et Microsoft, qui commencent à tirer des bénéfices de leurs investissements dans l’intelligence artificielle (IA). Vers 13H55 GMT (15H55, heure de Paris), le Nasdaq avançait nettement de 1,79%, le Dow Jones de 0,33% et le S&P 500 de 0,94%.

Lire aussiGoogle et Microsoft affichent des bénéfices stratosphériques, malgré des investissements très lourds dans l’IA

Le marché s’est donc concentré sur la progression sur un mois et a fait peu de cas de l’inflation sur un an, qui a atteint 2,7%, soit davantage que les 2,6% annoncés par les économistes.

« C’est un soulagement », a commenté Karl Haeling, de LBBW. Jeudi, le rapport sur l’activité économique du premier trimestre aux Etats-Unis avait, en effet, montré une accélération des prix. « Il s’avère que cela était lié à des révisions à la hausse des chiffres de janvier et février », le mois de mars n’ayant, lui, pas connu de sursaut, explique Karl Haeling.

Lire aussiInflation en zone euro : les trois points chauds que la BCE va surveiller en 2024

Une baisse des taux pas avant novembre ?

L’indice PCE est scruté de très près par les marchés, puisqu’il influe sur la politique de la Fed, la banque centrale américaine. Et une augmentation de l’inflation n’est pas la bienvenue, alors que l’institution monétaire s’est fixée pour objectif de la ramener à 2%, ce qu’elle pense pouvoir atteindre seulement en 2026.

Pour y parvenir, elle s’est lancée depuis mars 2022 dans une politique de resserrement monétaire. Son principal outil a été de relever les taux jusqu’en juillet dernier, les faisant grimper jusqu’à la fourchette de 5,25-5,50%, leur plus haut niveau depuis 20 ans. Depuis, elle a opté pour le statu quo : elle ne les relève plus, mais elle ne les baisse pas pour autant. Elle devrait commencer à le faire cette année, mais la date précise demeure inconnue, de quoi impatienter les marchés.

« L’économie continue de croître et l’inflation reste élevée au regard des objectifs de la Fed (2% par an), (…) ce qui laisse penser que les banquiers centraux vont rester patients et maintenir les taux élevés jusqu’à nouvel ordre », a résumé, dans une note ce vendredi, Rubeela Farooqi, de High Frequency Economics.

Plusieurs responsables de la Fed ont, en effet, pris la parole ces derniers temps pour souligner le fait qu’il fallait attendre. « Nous avons fait beaucoup de progrès en termes de réduction de l’inflation durant l’année écoulée, mais les données des deux derniers mois ont été décevantes », a estimé fin mars dans un discours à New York Christopher Waller, l’un des gouverneurs de la Fed.

D’autant que l’indice CPI, une autre mesure de l’inflation sur laquelle sont notamment indexées les retraites aux Etats-Unis, a également continué à accélérer le mois dernier, à 3,5% sur un an. Cela avait conduit le président de la Fed, Jerome Powell, à avertir qu’il faudrait sans doute « plus longtemps que prévu » pour avoir confiance dans le retour durable de l’inflation vers l’objectif de 2%.

Les marchés qui, il y a quelques semaines encore, tablaient sur une première baisse des taux dès le mois de juin, l’attendent désormais plutôt pour septembre, voire même novembre, selon l’estimation de CME Group. D’autant plus que le marché de l’emploi reste vigoureux, et le taux de chômage très bas, à 3,8% en mars.

Pire, selon un responsable de l’institution monétaire, la Fed pourrait bien finalement se contenter d’une seule baisse des taux en 2024, alors que les marchés en espèrent deux ou trois. Dans ces conditions, la première, et donc potentiellement seule baisse des taux pour 2023, ne pourrait intervenir qu’à « la fin de l’année, au dernier trimestre, selon ce que les données montrent », a conclu le responsable de la Fed.

La Fed se réunit mardi et mercredi, et les analystes guetteront toute indication qu’elle pourra donner sur ses intentions.

Croissance en berne

Néanmoins, les chiffres de la croissance économique, qui a fortement ralenti au premier trimestre, pourraient, eux aussi, influer sur les décisions de la Fed. À 1,6% en rythme annualisé, contre 3,4% au 4e trimestre 2023, la croissance du produit intérieur brut (PIB) est même tombée à son plus bas niveau depuis près de deux ans, après une année 2023 qui avait pourtant surpassé toutes les espérances, selon les chiffres publiés jeudi.

Cela pourrait contribuer à faire pencher la balance de la Fed dans l’autre sens, et la convaincre de ne pas non plus attendre trop longtemps avant de commencer à abaisser ses taux. Car si elle agit trop tard, l’économie, et donc l’emploi, pourraient souffrir.

(Avec AFP)

Lien source : Etats-Unis : alors que l'inflation augmente, les marchés restent satisfaits