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Green4Cloud veut disrupter le cloud avec une approche novatrice d’architecture distribuée de micro-datacenters

Face à la domination américaine et à la déferlante de l’IA générative (très consommatrice de données et de puissance de calcul), le gouvernement veut pousser le cloud français. La secrétaire d’État au Numérique, Marina Ferrari, a annoncé le 22 mars à Strasbourg le lancement d’un appel à projets pour renforcer l’offre de services cloud français, avec comme objectif de créer davantage de liens entre fournisseurs cloud et développeurs de logiciels d’IA. Car les entreprises françaises, comme Mistral ou Photoroom dépendent souvent de fournisseurs cloud américains, AWS (Amazon), Azure (Microsoft) et Google Cloud captant 70% du marché et 80% de sa croissance…

Outre l’enjeu de la souveraineté, le cloud pèse aussi sur l’empreinte environnementale du numérique : selon l’étude « iNum » de GreenIT datant de juin 2020, l’univers numérique français est constitué d’environ 631 millions d’équipements utilisés par 58 millions de personnes, consommant 180 TWh d’énergie primaire (6,2% de la consommation en France, 6 fois la consommation électrique de Paris), dont 13% liés aux datacenters.

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Ouverture de deux micro-datacenters

Dans le Gard, une initiative entrepreneuriale prospère autour d’une approche novatrice qui prétend apporter une solution pour contourner le recours massif aux solutions cloud des géants américains : Green4Cloud développe une architecture distribuée en plusieurs micro-datacenters de proximité, permettant ainsi de préserver la souveraineté des données sur un territoire et de consommer moins d’énergie grâce au circuit court de la donnée.

Créée fin 2022 par Julien Delcroix, Sébastien Lannes et Nicolas Leseignoux (rejoints depuis par Georges Hadziioannou), Green4Cloud est incubée à l’IMT Mines Alès (Gard) depuis octobre 2022 puis hébergée à Digit’Alès. Deux années de R&D plus tard, la startup ouvre ses deux premiers micro-datacenters à Vézénobres (Gard) et Saint-Aunès (Hérault).

Selon Julien Delcroix, le principe de cloud en architecture distribuée existe mais présente une grosse complexité de mise en œuvre, ce qui n’incite pas à son utilisation. Dans un autre genre, début 2023, la toute jeune société toulousaine Ormelia Web Industrie lançait la commercialisation de la WaouW Box, un véritable datacenter sécurisé tenant dans la paume d’une main, avec la promesse d’une consommation énergétique « plus faible qu’un téléphone portable ».

« Ce modèle de cloud distribué n’existe pas encore, alors que c’est un modèle qui offre plusieurs avantages, explique le dirigeant. C’est plus sécurisé : si un micro-datacenter est HS, les autres prennent le relais. C’est plus souverain à l’échelle d’un territoire, et on sait que les collectivités et TPE-PME aiment savoir où se trouvent leurs données, et avec Green4Cloud, ce sera dans un data-center à moins d’une heure de chez elles. Et l’impact écologique est moindre grâce au circuit court de la donnée. Comment ça marche : on constitue une colonne vertébrale disponible 24h/24 7j/7 s’appuyant sur des datacenters existants, par exemple HDC34 à Saint-Aunès et E-SI filiale des Transports Capelle à Vézénobres, et un maillage de micro-datacenters de proximité. A terme, nous aurons un maillage de 300 à 400 datacenters de proximité en France, tous connectés entre eux, où chaque gigaoctet est répliqué a minima dans un autre datacenter. »

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Utiliser la chaleur fatale des datacenters

Dans un deuxième temps, Green4Cloud prévoit d’héberger ses micro-datacenters sur des bâtiments tiers, « Ehpad, logements collectifs, piscine, etc. qui nous loueront leur bâtiment technique, il nous faut 10 m2, et sur le toit duquel nous mettrons des panneaux photovoltaïques en autoconsommation pour faire tourner le datacenter ». Mais ce n’est pas tout : la startup souhaite que la chaleur générée par les datacenters en service (dite fatale) permette de chauffer ces bâtiments partenaires.

Eco-conçu, ce cloud utilise 90% d’équipements reconditionnés, notamment des processeurs d’universités, de centres de recherche ou achetés à des brokers spécialisés.

« En termes de prix, nous sommes compétitifs, à 2,50 euros HT/utilisateur/mois pour une messagerie électronique avec visio intégrée, partage de fichiers et tchat, précise Julien Delcroix. On est bien placé par rapport à des faiseurs de service cloud régionaux, à la différence près que nous utilisons des solutions open source… Pour la commercialisation, nous ne vendons pas en direct aux TPE-PME, collectivités ou startups, mais nous passons par des entreprises de services numériques. »

La commercialisation de ces micro-datacenters de proximité va logiquement se déployer en cercles concentriques, « le Gard, l’Hérault, puis le Languedoc-Roussillon, l’Occitanie, la région PACA et la région Nouvelle-Aquitaine, etc. ».

Green4Cloud, qui compte cinq collaborateurs, prévoit de tripler ses effectifs en 2024 et d’atteindre 24 collaborateurs en 2025, pour un chiffre d’affaires de 1,7 millions d’euros, « soit 17 micro-datacenters installés, sachant qu’un micro-datacenter va générer 100.000 euros par an », précise Julien Delcroix. La startup vise une levée de fonds de 600.000 euros mais se heurte à un contexte de frilosité chez les investisseurs : « On nous demande au moins 600.000 euros de revenu récurrent annuel, donc idéalement, on devrait la faire d’ici cet automne ».

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Cécile Chaigneau

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