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Médicaments : la France appelle à une politique de relocalisation européenne

Terminé les pénuries de médicaments ? C’est peut-être le jour décisif pour l’industrie pharmaceutique tricolore, voire continentale. La Commission européenne a lancé ce mercredi « l’alliance européenne pour le médicament critique », suite à l’appel émis quelques mois en arrière par 23 États membres, dont la France, pour la naissance d’un Critical Medicines Act.

À cette occasion, le ministre de l’Industrie, Roland Lescure, s’est rendu spécialement à Bruxelles pour superviser et assister au début des travaux en la matière, avec un objectif bien en tête : que la France prenne le lead sur cette question.

« Le ministre a ainsi présenté un manifeste lors du lancement de l’alliance et nous sommes déjà soutenus par huit autres États membres (dont l’Italie, la Hongrie et les Pays-Bas, ndlr). D’autres pourraient suivre prochainement », souligne le cabinet du ministre.

La relocalisation en France de la production de médicaments était un dossier déjà en haut de la pile des sujets prioritaires du gouvernement, particulièrement depuis la crise sanitaire. Au début de l’été 2023, le président de la République, Emmanuel Macron, s’était rendu à Lyon pour annoncer son intention de relocaliser dans le pays la production de 50 molécules pharmaceutiques importantes et critiques, avec à la clé un guichet unique doté de plusieurs dizaines de millions d’euros pour les porteurs de projets. Mais cette promesse semble difficile à tenir…

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Coordonner les efforts industriels

Pour le moment, cette alliance européenne pour le médicament critique se matérialise par deux groupes de travail, l’un consacré à la relocalisation de la production de médicaments en Europe et le second sur la diversification des approvisionnements. Ils sont au total de 250 parties prenantes, dont des acteurs de la filière française. Charge à ces groupes de travail d’émettre par la suite des leviers d’action concrets à la Commission européenne.

« Cette alliance repose sur deux leviers. L’un est tout d’abord réglementaire et des mesures sont déjà en discussion, l’autre est industriel et c’est celui-là qui nous manquait jusqu’à présent », estime Bercy.

Dans l’espoir de peser sur les conclusions de ces groupes de travail, le ministre Roland Lescure leur a, dès lors, présenté « les trois axes prioritaires » défendus par la France. Si le premier repose sur la commande publique et ainsi des choix volontaristes, le second est bien plus engageant avec l’appel à « un plan de relocalisations coordonné en Europe ».

« Cela implique de partager des informations, sur nos besoins, nos forces et surtout nos faiblesses industrielles. Il est nécessaire de mieux se coordonner pour éviter de se retrouver avec 24 usines de paracétamol en Europe dans le futur », expose le cabinet du ministre de l’Industrie.

Un exemple pas du tout hasardeux de la part de son entourage alors que la France s’apprête à accueillir deux usines de paracétamol, à Toulouse et en Isère.

L’épineux sujet du prix

Enfin, le dernier point défendu par la France repose sur le nécessaire regain de compétitivité des productions pharmaceutiques européennes face à celles extra-européennes.

« Entre les deux, il y a un différentiel de 40% de compétitivité, principalement lié à des normes environnementales plus contraignantes. Les groupes de travail doivent se pencher sur cette question. Pourquoi pas envisager des clauses miroirs (pour les importations de médicaments en Europe, ndlr) ? », projette Bercy.

Pour les prochaines semaines, la France promet de « jouer un rôle clé » dans ces groupes de travail et attend vivement ses premières conclusions « pour la fin d’année ». Une initiative qui tombe à pic alors que sur la scène intérieure la filière fait face à un fait d’actualité majeur, la vente annoncée du géant français Biogaran des médicaments génériques par le groupe Servier, fragilisé par une demande moindre et des prix de médicaments qui ne permettent plus d’être compétitif.

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« Sur le sujet de la relocalisation, et encore plus sur des marchés réglementés, tout le monde doit faire une partie du chemin, notamment sur la question du prix : les industriels, les clients et les pouvoirs publics », avait confié à La Tribune quelques jours plus tôt Gildas Barreyre, le secrétaire général du groupe Seqens, qui participe aux deux groupes de travail.

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