samedi, avril 27

Nucléaire : EDF raccordera l’EPR de Flamanville au réseau électrique cet été

Ce sera un évènement. Après douze ans de retard et une facture qui a quadruplé par rapport au budget initial, à 13,2 milliards d’euros, le réacteur nucléaire EPR de Flamanville injectera pour la première fois de l’électricité dans le réseau français « à l’été 2024 », a indiqué ce mercredi EDF et non « mi-2024 » comme prévu jusqu’ici. Ce léger décalage de la date du « couplage » s’inscrit dans la foulée de l’annonce mardi par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN, gendarme du nucléaire) selon laquelle le chargement du combustible était repoussé à mi-avril au mieux au lieu du 31 mars comme initialement prévu par le groupe électricien.

« L’ASN va lancer dans les prochains jours la consultation sur le projet de décision de mise en service, c’est-à-dire qu’on va le soumettre aux commentaires du public pendant au moins 15 jours (…) voire 3 semaines, et à l’issue l’ASN prendra la décision de mise en service », a expliqué l’autorité de sûreté à l’AFP, confirmant des informations des Echos.

Cette consultation à l’issue de laquelle l’ASN rendra son avis de mise en service, en tenant compte ou pas des observations du public, est l’épilogue d’un chantier-fleuve, 17 ans après le lancement de la construction de l’EPR normand, marqué par de nombreux dérapages de coûts et de calendrier.

 « Après le chargement en combustible nucléaire du réacteur, les opérations de démarrage se poursuivront, avec notamment des contrôles de tous les systèmes liés à la sûreté, des essais et des qualifications de matériels réalisés tout au long de la montée en température et pression de la chaudière, puis lors de la montée en puissance du réacteur. A 25% de puissance, l’unité de production sera connectée au réseau électrique national », détaillait EDF en décembre 2022.

Pour le ministre de l’Industrie Roland Lescure, on n’est « pas à deux semaines près ».

Pour rappel, porté par un regain d’intérêt pour l’atome, EDF compte déployer des réacteurs de 3e génération (EPR) en France et en Europe à une échelle « industrielle », avec un objectif désormais de « deux par an », contre un ou deux par décennie actuellement. Le pari est ambitieux compte tenu des dérapages de coûts et de délais à répétition, incarnés par l’EPR de Flamanville. Le défi industriel est colossal pour le groupe, lesté d’une dette abyssale – 54,4 milliards d’euros – et critiqué pour les déboires de ses chantiers EPR. D’autant qu’EDF doit aussi répondre à la relance d’un programme nucléaire en France pouvant aller jusqu’à 18 réacteurs EPR2 – version améliorée de l’EPR – et mener à bien ses deux programmes anglais, Hinkley Point, dont le retard pourrait attendre six ans, et Sizewell.  En France, le gouvernement porte un programme de six nouveaux réacteurs EPR, estimés à 51,7 milliards d’euros.

Financement

Cette annonce intervient alors que le dossier des nouvelles centrales nucléaires, le directeur général de la Caisse des dépôts (CDC), Eric Lombard, a indiqué qu’il serait « logique » de financer de nouvelles centrales nucléaires avec l’épargne que les Français placent sur leurs Livrets A. « Parce que c’est un élément important de la décarbonation de notre économie », a-t-il ajouté lors de son passager sur Ecorama diffusée sur le site Boursorama.

 « Si on finance par exemple un tiers du programme nucléaire, ça représentera quelques milliards d’euros par an (…), c’est quelque chose qui est tout à fait absorbable par l’épargne des Français », a repris Eric Lombard, rappelant que sa « première priorité » restait le logement social.

Les sommes déposées sur les Livrets A et les Livrets de développement durable et solidaire (LDDS) sont pour 59,5% gérées par la Caisse des dépôts, et destinées essentiellement au financement du logement social. Les 40,5% restants sont gérés par les banques, et doivent être majoritairement dédiées à des prêts bancaires aux PME. Ces deux livrets ont attiré près de 40 milliards d’euros de dépôts l’an dernier et totalisaient fin février 571,5 milliards d’encours. Le directeur général a évoqué également le rôle de la « Caisse » dans le financement de l’armement, via son rôle d’actionnaire « de grandes entreprises qui ont une dimension d’armement dans leur activité ».

« Il faut probablement aller plus loin notamment pour financer le tissu industriel de PME, d’entreprises de taille intermédiaire », a-t-il complété, évoquant le rôle des banques, d’investisseurs institutionnels ou encore des compagnies d’assurance et non celui de l’épargne réglementée en la matière.

Le fléchage du Livret A vers l’industrie de la défense, souhaité par le Sénat, n’a pas non plus les faveurs de Bercy mais le ministre de l’économie Bruno Le Maire a lancé le 23 février l’idée de la création d’un produit d’épargne européen chargé entre autres de « financer notre effort de défense ».

Eric Lombard a par ailleurs affirmé que cette industrie était « tout à fait conforme » avec les critères environnementaux, sociétaux ou de gouvernance (ESG), « puisqu’on voit bien que la défense nationale c’est aussi la défense de notre démocratie et de notre trajectoire environnementale ».

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